La situation est la suivante : Vous faites l’objet d’un licenciement collectif pour motif économique. Votre employeur doit définir des critères d’ordre de licenciement qui doivent être légitimes, loyaux et non discriminants, respecter les accords collectifs et légaux.
Nous allons faire un tour d’horizon des décisions rendues en 202-2023 sur les critères d’ordre de licenciement.
À quel moment demander à votre employeur les critères d’ordre de licenciement Cour d’Appel de Nîmes 19 avril 2022 RG n°19/00946
Vous avez le droit de connaître les critères retenus par votre employeur pour fixer l’ordre des licenciements et vous permettre de vous assurer que votre employeur n’a pas été déloyal et qu’il n’a commis aucune erreur.
Vous devez en faire la demande par lettre recommandée avec avis de réception ou contre récépissé à votre employeur dans un délai maximum de 10 jours avant la date à laquelle vous quittez votre emploi article R.1233-1 du Code du travail https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000018537694
Une assistante sociale licenciée pour motif économique reproche à son employeur de ne pas lui avoir communiqué les critères d’ordre des licenciements. Elle avait quitté son emploi le 13 février 2017 en acceptant le contrat de sécurisation professionnelle (le contrat s’arrête alors à la date d’acceptation du contrat).
Elle avait demandé à son employeur les critères d’ordre de licenciement un mois plus tôt juste après avoir reçu la convocation à son entretien préalable, l’employeur répliquait que la salariée était hors délai car elle avait adressé sa demande avant d’être informée de son licenciement pour motif économique.
La cour n’est pas de cet avis car selon les juges rien n’interdit à la salariée d’agir avant le délai de 10 jours prescrits par la loi. Si vous pouvez demander les critères d’ordre avant votre licenciement, vous ne pouvez pas le faire au-delà du délai de 10 jours après la rupture de votre contrat de travail.
L’employeur est ici condamné à 1000 € d’indemnité car il n’avait pas répondu à la salariée.
Les difficultés rencontrées par les salariés handicapés – Cour d’Appel de Bordeaux 21 septembre 2022 RGn°19/00247
Le salarié avait été licencié dans le cadre d’un licenciement pour motif économique individuel, l’employeur devait donc appliquer les critères d’ordre prévu pour le licenciement collectif article L.1233-7 du Code du travail https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006901019
A savoir : 1. les charges de famille ; 2. l’ancienneté dans l’entreprise ; 3. les difficultés de réinsertion professionnelles notamment des personnes handicapées ; 4 les qualités professionnelles, un de ces critères pouvant être privilégié par l’employeur à la condition de respecter l’ensemble des autres critères légaux.
Or l’employeur n’avait pas pris en compte la situation de handicap du salarié ce que les juges ont sanctionné : « …en l’absence de prise en compte du handicap, alors que cette caractéristique est de nature à rendre la réinsertion professionnelle plus difficile (et qu’elle figure parmi un des critères d’ordre prévu par la loi)… les règles relatives aux critères d’ordre n’ont pas été respectées….Il sera en conséquence considéré que l’ordre des licenciements n’a pas été respecté…. Il sera alloué à X la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts pour inobservation de l’ordre des licenciements ».
Lorsque l’employeur établi de manière déloyale les critères d’ordre Cour d’Appel de Grenoble 31 mai 2022 RG n°20/00032
Une responsable de formation fait l’objet d’un licenciement pour motif économique et conteste les critères d’ordre des licenciements sur les charges de famille, les points étant établis en fonction de l’âge des enfants de chaque salarié.
Les juges observent que « ce calcul basé sur l’âge des enfants a eu pour conséquence de privilégier Mme [R] qui avait pourtant moins d’ancienneté, était plus jeune et disposait d’une formation pédagogique moindre, (sans que), l’association X ne démontre en quoi cette distinction opérée selon l’âge des enfants est pertinente et objectivement justifiée quant à la charge réelle des enfants eu égard à leur âge.
Les juges estiment que les critères d’ordre ont été établis de manière déloyale par des pondérations non pertinentes, la salariée ayant perdu son emploi après plus de 20 ans d’ancienneté, âgé de 50 ans et avec deux enfants à charge, elle obtient 34 000 €.
Lorsque l’employeur n’est pas assez précis pour établir les critères d’ordre de licenciement Cour d’appel de Grenoble 5 avril 2022 RG nº 19/03178
Un chef de chantier licencié pour motif économique conteste la manière dont a été comme critères d’ordre par son employeur la qualité professionnelle par catégorie professionnelle, il avait obtenu la note la plus basse parmi les autres chefs de chantier sans explication de son employeur.
Effectivement, l’employeur ne fournissait comme le constatent les juges « aucun document de comparaison entre les salariés et notamment s’agissant de leur qualité professionnelle », alors que le salarié disposait d’une expérience de 30 années dans le secteur d’activité.
De plus, aucune information n’était donnée sur les CV des salariés de la même catégorie qui n’avait pas été licenciée.
Compte tenu de cette absence d’information objective donnée au salarié disposant de sept ans d’ancienneté et âgée de 57 ans, en invalidité au jour de son licenciement, les juges lui accordent 10 000 €.