Une réunion décisive sur le télétravail est prévue ce lundi 23 novembre. Patronat et syndicats restent prudents sur le sujet. C’est aussi le cas de l’exécutif, qui n’a pris aucun texte de loi pour l’imposer.
Le patronat et les syndicats mènent leurs ultimes négociations sur le télétravail, ce lundi 23 novembre. Le gouvernement n’a pas, de son côté, prévu un texte de loi pour l’imposer. L’occasion de démêler le vrai du faux concernant ce nouveau mode d’organisation du travail.
Le télétravail est d’abord un outil de lutte contre l’épidémie : vrai
Le pourcentage de personnes, travaillant hors de leur entreprise grâce au numérique, a atteint 25 % lors du premier confinement. Avant de chuter cet été. Et de rebondir au deuxième confinement.
Au gré de l’évolution de l’épidémie, le gouvernement a accentué ou relâché ses consignes sur le télétravail. Mais il reste prudent sur sa portée dans « le monde d’après ». Pourtant certains salariés y ont pris goût. « Ils apprécient une certaine autonomie. Et ils ont moins de déplacements », note Catherine Pinchaut, de la CFDT.
« Dans les banques, le télétravail était peu développé, observe Frédéric Guyonnet, du syndicat SNB CFE-CGC. Depuis la crise sanitaire, la plupart des établissements ont signé ou amélioré leur accord d’entreprise. On est souvent passé de un à deux jours de télétravail par semaine dans les sièges. Mais les directions en profitent pour faire des économies en vendant des locaux et en mettant fin aux bureaux attitrés. Pas idéal en période d’épidémie. »
L’État a le droit d’imposer le télétravail : faux
« L’État n’a pris cette année aucun texte législatif ou réglementaire imposant le télétravail », indique Judith Bouhana, avocate en droit du travail. L’exécutif a pourtant adopté des mesures exceptionnelles sur les congés ou la durée du travail. Mais, en matière de télétravail, il s’est contenté de donner des recommandations aux entreprises. « En cas de non-respect de l’obligation, les moyens d’action de l’inspection du travail sont limités », déplore la CGT.
Le télétravail n’est pas non plus un droit, comme le sont les congés payés. « Il nécessite l’accord de l’employeur et du salarié », note Judith Bouhana. Une simple autorisation verbale du patron suffit. Attention aux contentieux.
Une minorité des salariés peut télétravailler : vrai
Seuls quatre postes sur dix sont praticables à distance. Le télétravail est fréquent chez les cadres commerciaux ou les ingénieurs informatiques. Rare dans la construction, le commerce, le transport, la restauration. D’où un clivage entre « cols blancs » et « cols bleus » lors du premier confinement : « Le télétravail protégeait la santé de certains, alors que d’autres allaient au boulot sans mesure de protection », rappelle Catherine Pinchaut.
Syndicats et patronat s’opposent sur le télétravail : faux
Ni les syndicats, ni le patronat ne demandent sa généralisation. « En télétravail, le salarié peut se retrouver isolé, paumé ou en suractivité, constate Éric Chevée, de la Confédération des PME. Cela pose aussi des problèmes d’organisation et de maintien du collectif. » Le syndicat FO est aussi au frein, mais pour d’autres raisons : « Le télétravail détruit de l’emploi, s’inquiète Cathy Simon, de FO services. Plus de télétravail, ça veut dire moins de locaux, donc moins de nettoyage, d’accueil, de restauration. Sans compter les risques de délocalisation. Si le travail est fait à distance, il peut être un jour effectué en Inde. Le télétravail ne devrait pas dépasser deux jours par semaine. »
D’accord sur le fond, les partenaires sociaux divergent sur la forme. Les syndicats demandent un encadrement national du télétravail. Le patronat préfère que ça soit négocié dans chaque entreprise.
Article publié sur Ouest-France par Jacques SAYAGH, le 23/11/2020