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Judith Bouhana Remuneration Variable

Ce qu’il faut retenir en 2022

Voici une une synthèse des décisions à retenir en ce début d’année 2022 pour obtenir sa rémunération variable.

 

1. C’est à l’employeur de prouver que les objectifs fixés au salarié sont réalisables (Cass. Soc. 15 déc. 2021 n°19-20978)

L’employeur doit produire les éléments établissant que les objectifs fixés au salarié sont réalisables, à défaut la rémunération variable au titre de l’exercice est due.

 

2. Même en période d’essai l’employeur doit fixer les objectifs au salarié (Cour d’Appel de Versailles, 21ème Ch. 6 janv. 2022 RG n°20/00024)

La période d’essai d’un salarié avait été rompue au bout de 3 mois sans que durant cette période les objectifs prévus dans son contrat de travail aient été fixés.

Les juges sanctionnent la société qui n’a pas fixé d’objectifs au salarié même si la relation contractuelle n’a duré que près de 3 mois. La prime variable est due

 

3. Quid de l’application d’une clause conditionnant la présence du salarié dans l’entreprise si le licenciement est nul ? (Cour d’Appel de Paris, Pôle 6 – Ch. 6, 30 juin 2021 RG n°20/05767)

Un Directeur de Logistique réclame sa rémunération variable non réglée par l’entreprise en application du contrat de travail exigeant la présence du salarié dans l’entreprise à la clôture de la période financière correspondante au bonus.

Mais le licenciement du salarié avait été jugé nul, dès lors les juges décident que cette condition de présence est inopposable au salarié « dès lors que c’est la société qui en a empêché l’accomplissement en licenciant le salarié de manière illicite ».

Les Juges condamnent l’entreprise à payer au salarié son bonus intégral sans prorata temporis.

 

4. Quand un bonus discrétionnaire devient un bonus contractuel : 

1/(Cour d’Appel de Versailles 17ème Ch. 3 nov. 2021 RG n°19/00527) :

Les Juges doivent requalifier les clauses signées entre les parties sans tenir compte de ce que les parties ont mentionné sur le contrat mais en analysant la situation réelle.

Dans cet arrêt, le contrat mentionnait une gratification éventuelle et discrétionnaire donc a priori non obligatoire.

Mais des courriers postérieurs au contrat de travail mentionnent le versement du bonus  « octroyé en fonction de la réalisation d’objectifs et des résultats de l’entreprise », des objectifs individuels financiers et non financiers et d’autres basés sur les résultats du groupe.

L’arrêt décide que les bonus du salarié « lui ont été octroyés en fonction de critères relatifs à sa performance, aux résultats de sa direction … et à celle de la société ou du groupe. Ce bonus était donc alloué en fonction de l’atteinte d’objectifs personnels et de la société. En dépit des dispositions contractuelles, l’employeur ne peut ainsi prétendre que le bonus était discrétionnaire. Dès lors, il y avait droit en fonction des objectifs atteints ».

2/ (Cour d’Appel de Paris Pôle 6 – Ch. 9 17 nov. 2021 RG n°17/050009) :

Il en est de même s’agissant d’un Directeur associé soumis à une rémunération fixe et variable en réclame le règlement, son employeur lui rétorque qu’il s’agit d’une prime exceptionnelle, mais la cour relève : « Une lettre d’engagement visant une rémunération fixe et un bonus… un contrat de travail stipulant une rémunération annuelle composée d’une partie fixe et d’une prime non fixe avec condition d’attribution de la prime non fixe précisée e, annexe 1. Une annexe intitulée « la lettre d’objectifs » et précisant les objectifs fixés ».

Les Juges en concluent « que la prime d’objectifs est contractualisée contrairement à ce que soutient l’employeur », et condamnent l’employeur à son versement.

 

5. Quand l’employeur falsifie les objectifs collectifs (Cour d’Appel de Paris, Pôle 6 – Ch. 8 4 nov. 2021 RG n°18/09909)

Un salarié soumet à des objectifs personnels et collectifs conteste les objectifs collectifs non sincères : « Des résultats ont été curieusement et sans explication remontés vers la holding, que le gonflement de près de 80% des « managements fees » et « ‘royalties succursale » ‘ont été aussi remontés vers la holding en 2015, ce qui a dégradé les résultats de la société X, sans lien avec son action managériale du salarié ».

Ce que les juges confirment : « si les pièces produites permettent de vérifier que ce résultat n’a pas été atteint, sur le bilan comptable de fin de cet exercice, force est de constater que c’est en raison de diverses opérations comptables vers la holding, les résultats intermédiaires étant très supérieurs », l’employeur déloyal est condamné au règlement du bonus du salarié.

 

6. Les objectifs ne peuvent pas être modifiés en cours d’année  

1/Cour d’Appel de Paris Pôle 6 – Ch. 8 27 mai 2021 RG n°18/04582

Lorsque des objectifs fixés dans l’entretien d’évaluation sont modifiés 3 mois plus tard, les juges décident qu’ « il ne peut d’une part être considéré que le salarié a accepté les objectifs qui lui ont été ainsi nouvellement fixés alors que ces derniers sont différents de ceux pour lesquels il a marqué son approbation en signant son évaluation », l’imprécision des critères qualitatifs ne mettant pas de surcroît « le salarié en mesure de l’atteindre ». La société doit payer la prime d’objectifs  au salarié.

2/ Cour d’Appel de Renne 7ème ch. 8 avril 2021 (RG n°/02435)

C’est l’imprécision de l’entretien annuel qui est ici sanctionné : « une énumération générale et imprécise des tâches à accomplir par le salarié durant l’année 2015 ne pouvant toutefois pas servir de base à l’attribution d’une prime variable annuelle, en l’absence de toute information préalable du salarié sur les modalités d’attribution et du mode de calcul de cette prime…(La société) « ne justifie pas de la notification d’objectifs précis et réalisables servant de base de calcul de la prime d’objectifs au titre de l’année 2015 ». La prime variable est due.

 

7. Même en cas de difficultés économiques de votre employeur votre prime d’objectifs doit être payée (Cour d’Appel de Bourges chambre sociale 10 décembre 2021 RG n°20/01090)

Un employeur plaide une conjoncture difficile pour ne pas régler le bonus du à son salarié.

Peine perdue, les juges décident qu’« il n’est pas contesté que la société X ne justifie pas de la fixation des objectifs au titre de l’année 2015 sans que la reprise de la société par la holding Y ne suffise à l’expliquer… faute pour elle d’avoir précisé au salarié les objectifs à réaliser ainsi que les conditions de calcul vérifiables, elle est tenue au paiement de la rémunération variable dans son intégralité, sans que la mauvaise santé économique de la société ne puisse lui être opposée ».

Rappelons pour finir l’obligation pour l’employeur de vous informer de vos objectifs en début d’exercice,  que vos objectifs doivent être réalisables, que c’est à votre employeur de prouver qu’ils le sont, toute imprécision ou absence de fixation des objectifs étant sanctionnée par le paiement de la prime fixée suivant les clauses contractuelles et à défaut les données de la cause (par analyse des primes versées les années précédentes).

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